L’Alpe 17 : éditorial

La montagne est riche de ressources inconnues dans la plaine. « Il y a des dizaines de millénaires que les hommes hantent l’arc alpin et qu’ils campent et vivent sur les versants de notre mémoire » écrivait l’ancien directeur du Musée dauphinois Jean-Pierre Laurent pour un spectacle sur l’atelier préhistorique de taille de pierres de Vassieux-en-Vercors, site sur lequel nos ancêtres ont laissé la trace extraordinairement habile de leur industrie lithique à la fin de la dernière glaciation. De ce silex bleu ils ont extrait de longues lames, outils et armes de guerre ou de chasse. L’une d’elles a été retrouvée en… Bretagne ! Dès alors commencent l’échange, le commerce et l’économie de la montagne.

Plus tard, viendront l’extraction minière du plomb, du fer, de l’argent et de l’or. Et la migration saisonnière, vers l’herbe, des grands troupeaux ovins pour la laine, des bovins pour le fromage. Puis, l’exploitation du marbre, de la pierre meulière pour les moulins, des calcaires argileux enfin, qui donneront naissance aux ciments modernes et à l’or gris du béton. Jusqu’à l’idée géniale de canaliser la force et l’énergie de la montagne à l’aube du siècle passé qui verra naître l’épopée de la houille blanche et de la fée électricité. Cinquante année plus tard, se sera la ruée vers l’or blanc transformant une calamité (la neige) en une industrie très lucrative.

L’homme a ainsi su tirer le meilleur parti de l’obstacle et de la difficulté que représente la pente. À tel point qu’aujourd’hui, la montagne est en passe d’être gommée. Des tunnels de base à de faibles altitudes, de plus en plus longs et coûteux, sont percés, mais surtout un flux permanent de connaissances et d’informations irrigue le territoire et se joue de l’obstacle. La révolution informatique a modifié considérablement les conditions du milieu naturel. Du premier silex préhistorique jusqu’au silicium des semi-conducteurs la voie était enclose dans les entrailles de la montagne. Cent mille ans séparent ces deux instants d’homo faber et economicus !

André Pitte

Retour en haut