L’Alpe 39 : éditorial

1839. Niépce et Daguerre donnent naissance à la photographie en même temps que le touriste invente les Alpes. En près de deux siècles, les hommes d’images n’ont ainsi cessé de mettre en scène leurs découvertes des multiples univers montagnards. Exploits sportifs des pionniers et témoignages ethnographiques sur la vie des gens de l’alpe, les regards se croisent en permanence entre deux mondes en perpétuelle mutation.

Depuis les images des frères Bisson réalisées au sommet du mont Blanc à la fin du XIXe siècle jusqu’aux recherches contemporaines très froidement descriptives du Tyrolien Walter Niedermayr sur les aménagements des stations de sports d’hiver, en passant par la poésie d’un Robert Doisneau, les Alpes ont toujours fasciné les photographes. En témoigne, le portfolio de ce numéro. Un étonnant jeu de « je t’aime, moi non plus » qui oscille entre émotion béate face aux paysages de la montagne et témoignages dénonçant les atteintes à un environnement que l’on dit encore préservé. Des figures de style sont ainsi nées au fil des ans et ont prospéré, parfois sans même que nous ne nous en rendions compte. Transformant l’iconographie alpine emblématique en une série de cartes postales. Des clichés que nous cherchons à déconstruire au fil de nos parutions…

Une fois de plus, L’Alpe s’attache ainsi à regarder de l’autre côté du décor pour décrypter les intentions des photographes et anticiper les tendances de demain. Une mission de résistance que nous entretenons avec passion. En cette année 2008, nous fêterons ensemble les dix ans de votre revue ! Ils étaient pourtant alors peu nombreux ceux qui croyaient en la pérennité d’un projet de presse ambitieux, s’attachant à privilégier l’information, le savoir et la connaissance.

Si nous en sommes là aujourd’hui, si nous lançons, très prochainement, dans le sillage de L’Alpe une nouvelle revue dédiée à la géographie de la planète toute entière, c’est grâce à vous, lectrices, lecteurs et abonnés. Vous qui nous démontrez, au fil des ans, qu’une publication aussi exigeante peut trouver place dans un paysage journalistique qu’il nous faut bien aujourd’hui qualifier de globalement sinistré. Chaque trimestre, les réflexions de notre rédaction se nourrissent ainsi de cet enthousiasme que vous nous apportez au quotidien. Merci. Merci mille fois. Et que cette nouvelle année nous renforce tous dans ces convictions de combat. Qu’elle succule, en somme, et de bien belle façon !

Pascal Kober

Retour en haut