Haïkus
Brindilles de thym
et frêle bouquet de marjolaine
entre mes doigts l’odeur
grise et mauve
de la montagne
Halte dans l’herbe tendre
au bord du sentier
mes amis s’esclaffent
un papillon bleu
s’est posé sur mon nez
Dans les éboulis de pierres
mes genoux me font mal
qu’il paraît long le sentier
pour regagner la vallée
Montagne bleue
surmontée d’un long nuage mauve
dans l’eau du ciel
où semble goutte à goutte
verser de l’encre
Procession de sapins
encapuchonnés d’ombre
sous l’aigre lumière filtrée d’un ciel de givre
Ici dans ces montagnes solitaires
seules semblent nous raccorder à la vie
les fines cicatrices de pattes d’oiseaux
égratignant les flancs des dômes de neige
Dans l’encadrement de la fenêtre
la lumière mourante
laisse couler un peu d’or
sur la montagne comme bleuie par le froid
et les grands arbres tristes
Dans le souffle d’un laps de lumière
séparant l’éclipse de deux tunnels
le train laisse entrevoir des ravins
pleins d’ombre et de glace
images subliminales de l’enfer
Vertigineuses falaises lilliputiennes
parcourues de volées
d’escaliers erratiques
et de véloces cordées de fourmis
le long du vieux mur
À l’orée du sommeil
par la pensée flottante
je retourne fidèlement
dormir
sur la paille odorante
de la bergerie solitaire
dans la montagne
Jean-Pierre Chambon, journaliste et poète.