L’Alpe 73 : éditorial

Silence. Tel est le titre d’une belle mélodie tout en douceur. Signée par le grand contrebassiste américain Charlie Haden, elle accompagne la rédaction de cet éditorial après la frénésie habituelle du bouclage d’un numéro de votre revue. Ce silence auquel le berger est si sensible lorsqu’il écoute avec attention le big band de son troupeau. Silence… C’est aussi pour lui que nous venons savourer les paysages sonores des Alpes. Pour entendre, plus fort encore, battre nos cœurs. Le philosophe Michel Serres nous le rappelle fort justement ici, dans l’entretien qu’il nous a accordé.

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Ce sens du silence, de la nuance, ce grain délicat de l’archet qui frotte les cordes de l’instrument, manquent cruellement aujourd’hui dans les productions standardisées, musicales comme éditoriales. Nous les avons retrouvés pour vous en nous promenant en creux dans les plis de la montagne. Et avons déniché quelques pépites que nous vous offrons dans ces pages imprimées et sur ce site Internet. Comme le chant de Youn Sun Nah sur le glacier, à la une de ce numéro. Comme ces jeunes musiciens qui partent, à pied entre France, Suisse et Italie, pour une tournée des refuges en transportant, sur le dos, balalaïka et autres guitares. Comme ces trublions du folk helvétique qui chamboulent les traditions pour inventer d’autres façons de dire les Alpes en musique.

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Le journaliste, l’écrivain, le peintre, le photographe, ceux qui font L’Alpe en somme, ne connaissent pas, dans leur pratique quotidienne, la formidable réaction en direct du public juste après l’énoncé final d’un thème. Plaisir du musicien. Plaisir de la musique en partage. Plaisir que vous pourrez expérimenter vous-même cet été en suivant notre guide pratique des festivals des sept pays de l’arc alpin avec les coups de cœur de la rédaction. Et qui sait, au fil de vos bal(l)ades, peut-être découvrirez-vous le jardin secret du rédac’ chef

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Car nos lecteurs les plus fidèles l’auront sans doute remarqué : c’est la première fois (et ce n’est pas un hasard) que nous revenons, en près de 18 ans d’existence, sur un thème déjà traité dans un dossier de la revue. À l’automne 2001, nous publiions en effet Les chants d’un monde, premier numéro de L’Alpe (accompagné d’un CD) dédié à la musique. C’est que le sujet est inépuisable. Et surtout, que la musique marque, par son caractère universel, ces cultures que nous aimons tant lorsqu’elles savent jouer à saute-frontière.

Pascal Kober
Rédacteur en chef

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